Contexte historique
Attaché à la direction de la compagnie Air France, qui venait d’être créée en 1933, Didier Daurat, personnage légendaire des lignes Latécoère, propose de créer une poste aérienne (comme en Allemagne et aux Etats-Unis) sur le territoire de la France métropolitaine.
A cette date, en 1935, Air France ne voit pas l’avantage du transport de courrier en avion par rapport au train sur de courtes distances et refuse la proposition. Didier Daurat ne s’estime pas battu et créent avec Beppo de Massimi, un autre ancien des lignes Latécoère, sa propre compagnie. Son ambition est de transporter le courrier de telle façon qu’une lettre, déposée le matin à Paris, puisse recevoir la réponse le soir même comme un télégramme ; d’où le nom « Air Bleu » qui lui est attribué et qui rappelle la couleur des télégrammes surnommés les « petits bleus ».
Daurat exige un avion ayant une vitesse supérieure à 250 km/h, une charge utile d’au moins 300 kg et capable de franchir une distance de 1000 km. Cet appareil doit être aussi équipé d’une instrumentation (horizon artificiel, compas gyroscopique et équipement radio) autorisant le vol sans visibilité (VSV) et de dégivreurs d’ailes. Le choix se porte sur le Caudron C630 « Simoun ». La première commande porte sur six appareils (F-ANRI à F-ANRN), avec une option pour quatre autres. Ils sont tous peints en bleu avec une flèche blanche sur le fuselage.
La nouvelle compagnie est complètement privée et ne demande aucune subvention à l’Etat. Dans son capital entrent, en particulier, les firmes Renault, Hachette, Chargeurs Réunis et Fraissinet. Son siège social est à Paris avec pour directeur général Beppo de Massimi et pour directeur d’exploitation Didier Daurat. Air Bleu passe alors un protocole d’accord avec l’Administration des Postes pour le transport du courrier sur le territoire français métropolitain : Le courrier aérien devra payer une surtaxe de 2,50 francs pour 10 grammes (la franchise normale était à l’époque de 0.50 francs).
L’inauguration a lieu le 10 juillet 1935. Georges Mandel, ministre des PTT, remet symboliquement à Raymond Vannier, chef du personnel navigant, le « Premier Courrier de Bordeaux » et quatre équipages décollent à la même heure du Bourget (11h45). Ils sont de retour l’après-midi même. Le Simoun venant de Lille se pose à 17h06, celui du Havre à 17h40, celui de Bordeaux à 18h24 et celui de Strasbourg à 18h30.
Au fil du temps la compagnie prend de l’ampleur. De nouvelles lignes sont ouvertes et le nombre d’avions augmentent. Jours après jours, la ligne passe avec une régularité qui frise les 100 %. Seul un accident survenu lors de l’escale de Tours, le 4 décembre 1935 entraînant la perte de l’avion RK et le décès du pilote Georges Texier, vient endeuiller cette belle aventure.
Hélas, le succès financier n’est pas à la hauteur du succès technique et le public, découragé sans doute par le coût de la surtaxe, n’est pas au rendez-vous. La compagnie enregistre des pertes considérables, et Air Bleu est contraint de cesser ses activités le 1er Août 1936.
L’administration des PTT, ayant pris la mesure de l’intérêt que représente le transport aérien du courrier, recrée Air Bleu avec le contrôle financier de l’Etat, moins d’un an après la cessation d’activités. Les vols reprennent le 7 juillet 1937. Le capital de la compagnie est ainsi partagé : Etat 52%, Air France 24% et les actionnaires d’Air Bleu 24%. Les tarifs sont, désormais, sans surcharge.
Dès lors, le volume du courrier ne cesse d’augmenter. Après deux années d’exploitation, en plus de 10.000 heures de vol, Air Bleu a parcouru environ deux millions de kilomètres et transporté 538 tonnes de courrier avec une régularité de 99,5 %.
Devant un tel succès, il apparaît bientôt nécessaire de mettre en œuvre des liaisons de nuit et la flotte des petits Simoun se révèle insuffisante. Air Bleu s équipe alors de 3 exemplaires d’un bimoteur léger le Caudron C.440/444 « Goéland ». Le premier vol postal de nuit a lieu le 10 mai 1939 sur la ligne Paris-Bordeaux-Pau.
La guerre éclate en septembre 1939 et Air Bleu est transformé en section de liaison 1/110, assurant de nombreux vols vers Londres et le Levant au départ du Bourget.
Source : Pégase n° 134 de septembre 2009
CAUDRON « Simoun »
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